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August 5, 2016

Les nouveaux Léviathans I — Histoire d’une conversion capitaliste (a) – Framablog
Techno-capitalisme

Longtemps nous avons cru que le versant obscur du capitalisme était le monopole. En écrasant le marché, en pratiquant des prix arbitraires, en contrôlant les flux et la production à tous les niveaux, un monopole est un danger politique. Devant la tendance monopolistique de certaines entreprises, le gouvernement américain a donc très tôt mis en place une stratégie juridique visant à limiter les monopoles. C’est le Sherman Anti-Trust Act du 2 juillet 1890, ce qui ne rajeunit pas l’économie moderne. Avec cette loi dont beaucoup de pays ont adopté les principes, le fameux droit de la concurrence a modelé les économies à une échelle mondiale. Mais cela n’a pas pour autant empêché l’apparition de monopoles. Parmi les entreprises ayant récemment fait l’objet de poursuites au nom de lois anti-trust sur le territoire américain et en Europe, on peut citer Microsoft, qui s’en est toujours tiré à bon compte (compte tenu de son placement financier).
Les anciens Léviathans I — Le contrat social fait 128 bits… ou plus – Framablog
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Autorité et PGP

La première diffusion de PGP était déjà illégale au regard du droit à l’exportation des produits de chiffrement, ce qui a valu à son créateur, Philip Zimmermann quelques ennuis juridiques au début des années 1990. La France a finalement suivi la politique nord-américaine concernant PGP en autorisant l’usage mais en restreignant son étendue. C’est l’esprit du décret 99-200 du 17 mars 1999, qui autorise, sans formalité préalable, l’utilisation d’une clé de chiffrement à condition qu’elle soit inférieure ou égale à 128 bits pour chiffrer des données. Au-delà, il fallait une autorisation jusqu’au vote de la Loi sur l’économie numérique en 2004, qui fait sauter le verrou des 128 bits (art. 30-1) pour l’usage du chiffrement (les moyens, les logiciels, eux, sont soumis à déclaration).
Les nouveaux Léviathans I — Histoire d’une conversion capitaliste (b) – Framablog
Piller le code, imposer des usages

À la fin des années 1990, c’est au nom de ce réalisme capitaliste, que les promoteurs de l’Open Source Initiative avaient compris l’importance de maintenir des codes sources ouverts pour faciliter un terreau commun permettant d’entretenir le marché. Ils voyaient un frein à l’innovation dans les contraintes des licences du logiciel libre tel que le proposaient Richard Stallman et la Free Software Foundation (par exemple, l’obligation de diffuser les améliorations d’un logiciel libre sous la même licence, comme l’exige la licence GNU GPL – General Public License). Pour eux, l’ouverture du code est une opportunité de création et d’innovation, ce qui n’implique pas forcément de placer dans le bien commun les résultats produits grâce à cette ouverture. Pas de fair play : on pioche dans le bien commun mais on ne redistribue pas, du moins, pas obligatoirement.
Les nouveaux Léviathans II — Surveillance et confiance (b) – Framablog
Trouver les bonnes clés

Cette logique du marché, doit être analysée avec d’autres outils que ceux de l’économie classique. L’impact de l’informationnalisation et la concentration des acteurs de l’économie numérique ont sans doute été largement sous-estimés, non pas pour les risques qu’ils font courir aux économies post-industrielles, mais pour les bouleversements sociaux qu’ils impliquent. Le besoin de défendre les droits et libertés sur Internet et ailleurs n’est qu’un effet collatéral d’une situation contre laquelle il est difficile d’opposer seulement des postures et des principes.
Les nouveaux Léviathans II — Surveillance et confiance (a) – Framablog
Techniques d’anticipation

On pense habituellement les objets techniques et les phénomènes sociaux comme deux choses différentes, voire parfois opposées. En plus de la nature, il y aurait deux autres réalités : d’un côté un monde constitué de nos individualités, nos rapports sociaux, nos idées politiques, la manière dont nous structurons ensemble la société ; et de l’autre côté le monde des techniques qui, pour être appréhendé, réclamerait obligatoirement des compétences particulières (artisanat, ingénierie). Nous refusons même parfois de comprendre nos interactions avec les techniques autrement que par automatisme, comme si notre accomplissement social passait uniquement par le statut d’utilisateur et jamais comme producteurs. Comme si une mise à distance devait obligatoirement s’établir entre ce que nous sommes (des êtres sociaux) et ce que nous produisons. Cette posture est au plus haut point paradoxale puisque non seulement la technologie est une activité sociale mais nos sociétés sont à bien des égards elles-mêmes configurées, transformées, et même régulées par les objets techniques. Certes, la compréhension des techniques n’est pas toujours obligatoire pour comprendre les faits sociaux, mais il faut avouer que bien peu de faits sociaux se comprennent sans la technique.
Les anciens Léviathans II — Internet. Pour un contre-ordre social – Framablog
De la légitimité

Michel Foucault, disparu il y a trente ans, proposait d’approcher les grandes questions du monde à travers le rapport entre savoir et pouvoir. Cette méthode a l’avantage de contextualiser le discours que l’on est en train d’analyser : quels discours permettent d’exercer quels pouvoirs ? Et quels pouvoirs sont censés induire quelles contraintes et en vertu de quels discours ? Dans un de ses plus célèbres ouvrages, Surveiller et punir[1], Foucault démontre les mécanismes qui permettent de passer de la démonstration publique du pouvoir d’un seul, le monarque qui commande l’exécution publique des peines, à la normativité morale et physique imposée par le contrôle, jusqu’à l’auto-censure. Ce n’est plus le pouvoir qui est isolé dans la forteresse de l’autorité absolue, mais c’est l’individu qui exerce lui-même sa propre coercition. Ainsi, Surveiller et punir n’est pas un livre sur la prison mais sur la conformation de nos rapports sociaux à la fin du XXe siècle.